Je préfère le dissensus dur au caramel mou

Je préfère le dissensus dur au caramel mou
Medusa – Il Caravaggio

Parfois on aimerait, face à la violence du monde, qu’un garçon vous prenne dans ses bras et murmure : « Ça ira, je suis là, on connaîtra des jours meilleurs… »

mardi 25 juillet 2017

Angelo

En 1958, Jean Giono publie Angelo chez Gallimard. Ce livre est écrit en 1945, et doit être le premier d'une série qui fait se confronter des périodes de temps où s'éclairent les conduites des hommes. Un projet terrible, que même un écrivain comme Giono ne peut mener à terme, et auquel il renonce dans sa forme initiale.
Néanmoins, il se livre, dans la fameuse émission « Lectures pour tous» interrogé par Pierre Dumayet, à quelques confidences passionnantes. D'abord l'hommage à son père, Jean-Antoine, qui fut carbonaro, et, de ce fait, condamné à mort en Italie et auquel l'exil permit de continuer son engagement philosophique d'une autre manière. Ensuite Giono donne également, sinon des «recettes» d'écriture, du moins l'attitude qu'il adopte dans son travail de réflexion entre le moment où il pense ses personnages et celui où il réalise cette écriture. Ses personnages ont alors une vie propre dont il ne maîtrise pas forcément les séquences ou les manières de se comporter dans le déroulement de l'histoire. Cette emprise de l'histoire et des personnages a quelque chose de fascinant dont l'écriture retrace le témoignage : Jean Giono rappelle que si l'écriture d'Angelo a nécessité six jours de travail, c'est un long travail d'alchimie dont seul son esprit a pu permettre l'élaboration. Parallèlement, plusieurs narrations peuvent émerger dans le même temps, dont la forme nécessite une expression différente, donnant l'idée qu'elles sont issues de moments ou de temporalités différentes.
Deux formes du voyage, dont Jean Giono fut un praticien dans l'écriture. Je repense à quelques auteurs : Sylvain Tesson, Jacques Lacarrière, Nicolas Bouvier. A la grande diversité qui les caractérise se retrouve la convergence de ce sentiment extraordinaire qui permet le voyage, où que l'on se trouve.

« C'était une nuit extraordinaire.
Il y avait eu du vent, il avait cessé, et les étoiles avaient éclaté comme de l'herbe. Elles étaient en touffe avec des racines d'or, épanouies, enfoncées dans les ténèbres et qui soulevaient des mottes luisantes de nuit. »
écrit Giono au tout début de Que ma joie demeure.

Lorsque l'esprit a laissé se poser la manière dont les éléments s'ajustent, dans la seule logique des choses simples, alors les personnages arrivent tout seuls, seuls maîtres de leur propre histoire.



1 commentaire:

Silvano a dit…

Immense écrivain. J'ai le souvenir de quelques lignes admirables sur les anges. Sauriez-vous les retrouver ? J'aimerais les utiliser un jour en exergue d'un roman à venir.