Je préfère le dissensus dur au caramel mou

Je préfère le dissensus dur au caramel mou
Medusa – Il Caravaggio

Parfois on aimerait, face à la violence du monde, qu’un garçon vous prenne dans ses bras et murmure : « Ça ira, je suis là, on connaîtra des jours meilleurs… »

jeudi 30 novembre 2017

Tout est blanc

Bon ça y est : mon opérateur m'a rebooté sur son propre réseau et non plus sur celui de l' «opérateur historique ». Je n'insisterai pas sur ce jargon ridicule des technocrates, du moins pas aujourd'hui. Mais ce n'est pas encore la fibre optique, loin de là...

Cette petite pause marque également un tournant sur mon blog, un de plus. J'étais à peu près revenu à une publication quotidienne, en attendant peut-être l'arrêt définitif du blog. Pour l'instant ce n'est pas tout à fait à l'ordre du jour, bien que la logique des choses fasse qu'à tout commencement réponde une fin, même si ce n'est pas un achèvement. J'espère en tout cas  que cette décyclopédie commencée il y a un peu plus de trois ans aura exploré un certain nombre des sujets qui me constituent et dont je pense qu'ils peuvent également être sujets d'intérêt pour les lecteures* de Véhèmes. Quelques textes vont venir; toutefois les billets n'auront pas la régularité antérieure. Ce n'est pas l'actualité qui fait la règle des publications de Véhèmes, même si je ne peux pas être indifférent à la marche du monde. Je vais prendre toutefois une distance : je ne me retrouve plus, depuis longtemps, dans la blogosphère, qu'elle soit à connotation gaie ou non. Mais comme la blogosphère est également une petite partie de l'image du monde, c'est donc le monde qui reste assez peu appétissant. Bon, peu importe, après tout : chaque jour est à réinventer, du moins à sa propre dimension !

Un autre vieux, pour la reprise de ces billets, Etienne Daho. J'ai enfin trouvé son album Blitz, dans les bacs du commerce. Etienne vieillit bien, et c'est toujours aussi agréable de l'écouter : les textes sont d'excellente qualité, les mélodies également. Du pur Daho. Je vais essayer de vieillir aussi bien que lui !

* Tiens, pourquoi pas intégrer un masculin/féminin dans le même mot ? C'est en tout cas plus lisible que le système à ponctuations... (oui, lectrices existe aussi...)



vendredi 24 novembre 2017

Stand by/Suspens

Des problèmes de connexion à Internet dus à des modifications de réseau vont perturber la publication de billets pendant quelques jours. C'est l'occasion de mettre le blog en suspens. J'en profiterai pour terminer les textes en attente depuis quelque temps.

Les billets reviennent bientôt.

Ostia - Trova la tua nuova casa - 2017


jeudi 23 novembre 2017

Utopies

Un court. Une rencontre comme le parcours d'une impasse dans des architectures déjà révolues...


mardi 21 novembre 2017

Blitz, Eclair au café

Etienne Daho sort un nouvel album Blitz. Etienne Daho est un être lumineux environné de traînées d'obscurité, celles que le passé, que l'enfance ou que les choses indicibles ne permettent pas de montrer au grand jour. J'attends alors la sortie de cet éclair. 

Dans l'attente veuillez agréer ces deux clips déjà anciens : Double zéro à l'infini, de l'album Paris ailleurs, sorti en 1991 (c'était hier) et La ville, avec le très regretté Daniel Darc, un autre grand brûlé de la vie («Cherchez le garçon, trouver son nom...»).



lundi 20 novembre 2017

dimanche 19 novembre 2017

El cant de la Sibila provençal

El cant de la sibil.la (les Catalans écrivent Sibil.la pour éviter la prononciation avec la palatalisation, c'est-à-dire en prononçant le l mouillé, comme les Italiens prononcent le gl de famiglia par exemple ; l'écriture «inclusive» n'a donc rien vraiment inventé, et il faut être un peu rompu à cette lecture pour en éviter les écueils, mais tout se fait!)

Alors, lo cant de la sibila (en occitan) : imaginons une tradition de prophétesses issues du monde antique. Elles rendent des oracles, c'est-à-dire annoncent les événements d'importance à venir. Le monde chrétien fait perdurer cette tradition en donnant à croire en l'avènement du Messie qui jugera ceux qui ont eu confiance en sa parole. Plusieurs versions du Chant de la sibylle coexistent : une version latine, provençale (occitane), catalane, galicienne, castillane. Ces versions ont donné lieu à deux CD édités en 1988. La regrettée Monserrat Figueras sous la direction de Jordi Savall interprète ces différentes versions accompagnée par la Capella Reial de Catalunya. Voici la version occitane.

Passez un agréable dimanche.



samedi 18 novembre 2017

Xenia

Xenia est sorti voici trois ans déjà ! On ne peut qu'avoir envie de le voir ou de le revoir tant les personnages sont attachants, recherchant leur père à Thessalonique, dans une Grèce en plein désarroi (Athènes et sa périphérie ont bien dégusté, ces derniers jours !). La situation de la Grèce est toujours préoccupante, tant en ce qui concerne son économie que sa sociologie politique, (mais enfin, c'est toute l'Europe qui est dans un bordel politique monstre avec les fachos xénophobes et racistes qui pointent leur nez de tous les côtés...).

Le film est de Panos Koutras : la critique d'Aurélien Férenczi dans Télérama est consultable ici.


vendredi 17 novembre 2017

Nilda

Daniel Fernández, dit Nilda, que deviens-tu ? Sorti un peu des horizons médiatiques, on ne saurait t'en vouloir... Sans doute passes-tu sur des scènes un peu confidentielles.

La invitación a Venecia en version espagnole date de 1991. On se passerait volontiers de la présentation de la vidéo ci-dessous par le garçon un peu niais qui s'obstine, comme beaucoup de gens, à parler du passé en utilisant le futur, au prétexte qu'un moment de ce passé se déroule dans une séquence ultérieure du même passé. Au moment où les académiciens fébriles s'émeuvent de manière gériatrique de l'utilisation de l'écriture inclusive - qui n'est qu'une blague à la mode comme d'autres ; commençons par accorder les participes passés correctement au féminin ! - tout cela paraît bien dérisoire...

Enfin, Nilda, si tu reviens nous voir, sache qu'on apprécie toujours ta douceur, ta tendresse, ta sensibilité et ton beau sourire, même si tu as vieilli, comme nous tous...

jeudi 16 novembre 2017

Looking for Tadzio

Un court d'Etienne Faure, non daté, mais sans doute déjà ancien.

Bjorn Andresen a aujourd'hui 62 ans. Il y a des magies qui font qu'on ne peut pas vieillir quand on le voudrait jamais...


Hommage à Françoise Héritier

Triste journée où l'on apprend le décès de Françoise Héritier, grand nom de l'ethnologie et de l'anthropologie. J'avais assisté plusieurs fois à ses conférences, et j'ai eu également le plaisir de m'entretenir avec elle il y a quelques années au cours d'une soirée amicale. Elle était l'intelligence incarnée des situations sociales complexes. Il fallait peut-être en effet être une femme, ou connaître des situations de domination sociales et culturelles, pour être placé dans l'obligation de saisir les logiques qui mènent l'établissement des normes culturelles. On trouvera dans tous les bons sites le parcours de cette pensée qu'elle a contribué à faire aboutir, au moment où, en France, se constituaient et se structuraient les disciplines de la pensée de la différence. Ce n'est sans doute pas un hasard si elle est parvenue à définir les termes de la parenté en Afrique, alors en Haute-Volta, en essayant de comprendre dans quels cas les interdits d'alliances existent et ressortissent alors au domaine de l'inceste, dont l'acception, en Occident paraît plus limitatif.




Son travail essentiel a été de mettre en lumière la nature féminine non seulement dans la compréhension de sa définition comme opposition binaire aux hommes, mais surtout dans la spécificité qu'ont les femmes à produire du même et du différent - une femme peut faire naître une fille comme elle-même ou un garçon, ce qu'elle n'est pas - ce que les hommes sont évidemment incapables de faire : les hommes doivent passer par les femmes pour produire des hommes. Ce pouvoir, qui apparaît magique dans les sociétés archaïques - les sociétés contemporaines sont toujours archaïques du point de vue de l'inconscient des sociétés - paraît ainsi exorbitant. Il explique la raison de la domination masculine qui reprend par son positionnement physique d'une part, institutionnel d'autre part, la capacité à décider et à agir symboliquement là où elle ne peut le faire biologiquement.

Cette pensée de la différence est venue opportunément compléter le travail déjà monumental de Claude Lévi-Strauss. Ce dernier avait mis en lumière le rôle des femmes comme biens d'échanges dans les sociétés, qui ne relevait pas seulement des sociétés archaïques : à ce titre, si les femmes, en France, ne sont plus des incapables majeures, ce n'est que depuis une période relativement récente. La République espagnole avait résolu ce problème bien avant la que France retrouve sa raison républicaine.

Étrangement, avec Françoise Héritier disparaît une partie visible de ce que l'ethnologie et l'anthropologie ont été en mesure de produire dans leurs rapports institutionnels aux sociétés dominées, autrefois colonisées. Dans le même temps, les institutions de la culture, des savoirs universitaires, paraissent aujourd'hui bien en panne pour apporter aux questions que le monde se pose aujourd'hui des outils de compréhension et d'action efficaces. Là est un autre débat.



mercredi 15 novembre 2017

Le livre des merveilles

Marco Polo, de retour d’Orient, fut emprisonné à la fin du duecento à la prison de Gênes après sa capture lors du conflit entre Venise et Gênes. C’est là qu’il dicte le récit du Livre des merveilles ou le devisement du monde, laissant l’Occident dans une soif inextinguible de curiosité et de découvertes qui bouleversent la vision du monde…



En 1965, Denys de la Patellière et Noël Howard réalisèrent La fabuleuse aventure de Marco Polo, avec Horst Buchholz dans le rôle-titre et Omar Sharif dans celui de l’émir Alaou. Il en reste des images superbes, tournées en décors réels. Je ne suis pas sûr que les mêmes performances cinématographiques pourraient être reproduites aujourd’hui.

On a un peu oublié Horst Buchholz, décédé en 2003. On se le rappelle dans Les Sept Mercenaires, de John Sturges, tourné en 1960. Par la suite, sa carrière fut un peu difficile, tournant principalement pour la télévision. L’un de ses derniers rôles au cinéma fut dans La vita è bella, de Roberto Benigni, en 1997.

On appréciera les deux beaux gosses, Horst et Omar, dans cet extrait tourné sans doute en Afghanistan, dont les paysages sont somptueux. Le film était une production internationale (Afghanistan, Égypte, France, Italie, Yougoslavie). On peut regretter qu’il soit peu rediffusé sur les chaînes publiques.

Horst Buchholz, considéré comme l’Alain Delon allemand, eut de nombreuses conquêtes ; il révéla tardivement sa bisexualité.

lundi 13 novembre 2017

Chéries-Chéris

Petits veinards de Parisiens qui n'allez pas à Bordeaux pour manger des chocolatines - en Cévennes on mange des pains au chocolat, tout simplement - vous avez la chance de pouvoir profiter du festival Chéries-Chéris qui se tient du 14 au 21 novembre 2017 . Le programme est alléchant. Je retiens le documentaire sur Jean Genet, de Michèle Collery, Jean Genet, parcours d’un poète combattant, réalisé en 2016. Ce film est projeté au Mk2 Beaubourg, dimanche prochain 19 novembre à 15 h 15, salle 1. Je ne sais pas ce que vaut ce documentaire. Il y en a eu déjà un certain nombre, d'intérêt inégal. Il est toujours difficile de reprendre, faute de documents suffisamment étayés, de nouvelles informations sur Jean Genet. Tout n’a-t-il pas été dit ? Je n’ai pas trouvé d’extrait à présenter ici.

Le programme du festival est consultable ici.

La soirée de clôture présentera le film d'Anne Fontaine, Marvin ou la Belle Education d'après le roman d'auto-fiction d'Edouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule. Les deux comédiens qui jouent Marvin sont excellents : Jules Porier qui joue Marvin enfant et Finnegan Oldfield, une fois devenu adulte. J'attends impatiemment de les voir dans le film. Les autres comédiens sont d'excellente pointure, et on peut féliciter Anne Fontaine pour l'ensemble du casting. Concernant le livre d'Edouard Louis, je suis plus réservé : il me semble que la critique journalistique, toujours à l'affût de pittoresque, a donné au roman alors une dimension qu'il ne mérite pas forcément.

Voilà pour ce billet : allez soutenir ce festival. Je sais qu'il sera achalandé, mais la visibilité queer doit être toujours plus forte...


dimanche 12 novembre 2017

Bleibet meine Freude !

L'orgue partage avec l'amour une particularité : il est masculin au singulier, féminin au pluriel. Cela devrait suffire à dire son ambiguïté, et pourquoi pas, son appartenance au domaine des esprits tourmentés. C'est peut-être pour cela que le dessinateur belge Roger Leloup avait imaginé un orgue du diable, dont les événements se déroulaient dans les hauteurs fortifiées au dessus du Rhin : son héroïne japonaise, Yoko Tsuno avait l'heur d'apporter sa touche aussi rationnelle que séduisante dans des domaines où l'esprit avait franchit l'espace-temps aussi rapidement qu'un boson de Higgs.

Que l'orgue soit un instrument du diable, ce n'est pas vraiment étonnant : les différents registres permettent de faire jouer différentes tonalités parmi les 5000 tuyaux de cet instrument d'exception, marié au monument dans lequel il est installé. Les Américains, dont certains ne sont jamais en panne de mégalomanie, ont conçu un orgue de plus de 33 000 tuyaux, paraît-il. On imagine la puissance alors mise en oeuvre pour donner aux fréquences les alliances voulues par l'organiste.

«Sans Bach, la théologie serait dépourvue d'objet. S'il y a quelqu'un qui doit tout à Bach, c'est bien Dieu !» avait écrit Emile Cioran. Le grand débat du XXe siècle nous ramène à lui : le monde doit-il être désenchanté, ou, au contraire, peut-on instiller un émerveillement permanent à tout ce qui peut être, fort d'une curiosité qui, elle, ne peut être qu'insatiable ?
Réponse de Jean-Sébastien : «Jésus, que ma joie demeure !» Jean Giono en fit l'un de ses plus beaux romans, dont la constellation d'Orion vient augurer les prémisses.
Ici, le jeune néerlandais Gert van Hoef, maîtrisant claviers, pédalier et divers registres, apporte sa touche avec une improvisation sur le choral de Jean-Sébastien.

Passez un agréable dimanche !



samedi 11 novembre 2017

Une histoire de l'anarchisme

Ajourd'hui, 11 novembre. On commémore en France les dégâts que les bouchers de l'humanité ont organisés. Le goût du sang et de la chair déchiquetée doit être dans les gènes de la civilisation occidentale pour en avoir à ce degré mis au point les méthodes industrielles. Je n'exonère pas les autres civilisations du goût de la barbarie, qui est également l'un des propres (!) de l'humanité.

Voici un excellent documentaire, long, certes, présenté sur Arte voici quelques mois, dû à Tancrède Ramonet qui a réussi là une magnifique synthèse de l'histoire de cette belle utopie philosophique qu'est l'anarchisme. Prenez le temps de le voir en plusieurs fois. L'histoire des hommes est également celle de leurs ignominies. C'est parfois difficile, émouvant, de revoir ou de voir, plus simplement, certains moments de déchirements du mouvement populaire.

Le point de vue critique reste celui qui ne concède aucune compromission avec la doxa, l'idéologie dominante et le principe de domination. Certains signes, aujourd'hui dans le monde, montrent que le point de vue critique gagne du terrain.

vendredi 10 novembre 2017

Pierre Aleyrangues nu

Pierre Aleyrangues fut un des personnages que je voyais assez souvent au cinéma étant enfant : il était plus connu sous la dénomination du «Nain Piéral». Sa force de caractère lui permit d'affronter sa double différence, physique - il mesurait 1,23 m - et son orientation sexuelle. Il fréquenta assidûment  Jean Cocteau, Jean Marais et le milieu intellectuel qu'ils représentaient. Sa manière d'être fut que l'homosexualité alors ne pouvait être qu'une façon d'être marginal dans une société qui ne tolérait que la norme. J'aime particulièrement cette photographie où il se montre nu, et fier de son corps quand tout pouvait dire que les normes de la virilité - ou de celles des éphèbes - reposaient sur d'autres canons de la beauté. En ce sens, il a réussi à proposer, dans cette pose qui n'est ni arrogante, ni vulgaire, sa capacité à dire que le corps vit dans ses propres mystères.

Pierre Aleyrangues

jeudi 9 novembre 2017

Je n'arrive pas à dormir

Encore un court, très agréable à visionner, d'une tranche de vie italienne. Qui plus est les italianismes des sous-titres sont un régal !



mardi 7 novembre 2017

Janis and Sharon

Voici un an, déjà, que Leonard Cohen s'en est allé vers le néant. Son album You want it darker venait juste de paraître, qu'il avait terminé péniblement tant la maladie avait progressé. Dans une dernière interview publique, il laisse entendre qu'il est prêt à mourir, quelques mois après Marianne qui fut l'un de ses grandes amours. Peut-être la seule véritable, alors qu'ils étaient tous deux en quête d'une quiétude trouvée un temps à Hydra.
Hydra, île curieuse, où l'on s'imagine facilement que l'on se trouve dans une autre dimension du monde et du temps, où l'on peut également perdre le sens commun. Ce n'est peut-être pas plus mal. Un monastère s'y trouvait à quelques kilomètres du port, accessible par un chemin de mulets. 
Hydra restera ce chemin où l'on sait que l'on n'a pas besoin de ciel.



Si Janis Joplin dont le nom était déjà une légende avant qu'elle-même ne disparût, eut une place curieuse dans la vie et l'oeuvre de Leonard Cohen, exerçant à la fois une fascination et suscitant une distance que la vie marginale du New-York de cette période imposait pour ne pas être happé par cette tourmente, une autre femme tient, professionnellement, une place majeure dans son travail musical : Sharon Robinson, dont la voix est exceptionnelle. Elle coécrit avec Leonard toutes les chansons de Ten new songs, paru en 2001, dont elle assure elle-même la production. 

L'une des chansons est Alexandra leaving, «Le départ d'Alexandrie». Il s'agit de l'adaptation d'un poème de Constantin Cavafis que j'ai souvent évoqué ici dans Véhèmes. Voici le poème de Cavafis, intitulé Antoine abandonné de Dieu :

« Quand soudain, aux environs de minuit,
tu entendras passer un cortège invisible,
avec des mélodies sublimes, ponctuées de clameurs -
alors sur ta fortune qui chancelle, sur tes oeuvres
qui ont échoué, les projets de ta vie qui tous
se sont révélés n'être que chimères, ne te lamente pas en vain.
En homme prêt depuis longtemps, en homme courageux,
une dernière fois salue Alexandrie qui s'éloigne.
Surtout n'abuse pas, ne t'en va point dire
que ce n'était qu'un rêve, que ton oreille s'est méprise ;
à d'autres d'aussi sottes espérances.
En homme prêt depuis longtemps, en homme courageux,
comme il convient à qui pareille cité s'est livrée,
approche-toi résolument de la fenêtre,
et avec émotion, certes, mais sans
les plaintes et supplications des lâches, écoute,
dans une ultime jouissance, les sons inouïs,
les si doux instruments du mystérieux cortège,
et salue-la, cette Alexandrie que tu perds.»

-1911-

traduction de Dominique Grandmont

L'adaptation de Leonard Cohen et de Sharon Robinson est la suivante :

Alexandra leaving

Suddenly the night has grown colder.
The god of love preparing to depart.
Alexandra hoisted on his shoulder,
They slip between the sentries of the heart.

Unhelp by the simplicities of pleasure,
They gain the light, they formlessly entwine;
And radiant beyond your widest measure
They fall among the voices and the wine.

It's not a trick, your senses all deceiving,
A fitful dream, the morning will exhaust -
Say goodbye to Alexandra leaving.
Then say goodbye to Alexandra lost.

Even though she sleeps upon your satin;
Even though she wakes you with a kiss.
Do not say the moment was imagined;
Do not stoop to strategies like this.

As someone long prepared for this to happen,
Go firmly to the window. Drink it in.
Exquisite music. Alexandra laughing.
Your firm commitments tangible again.

And you who had the honor of her evening,
And by the honor had your own restored -
Say goodbye to Alexandra leaving;
Alexandra leaving with her lord.

Even though she sleeps upon your satin;
Even though she wakes you with a kiss.
Do not say the moment was imagined;
Do not stoop to strategies like this.

As someone long prepared for the occasion;
In full command of every plan you wrecked - 
Do not choose a coward's explanation
That hides behind the cause and the effect.

And you who were bewildered by a meaning;
Whose code was broken, crucifix uncrossed - 
Say goodbye to Alexandra leaving.
Then say goodbye to Alexandra lost.

Say goodbye to Alexandra leaving.
Then say goodbye to Alexandra lost.

Le paradoxe est à noter : dans la première version de Chelsea hotel, Leonard Cohen raconte «Cet hiver de 1967, mes amis d'alors devenaient tous pédés; et moi j'essayais seulement de d'exister...» Homophobie ? Non sans doute, d'autant que l'entourage de Leonard Cohen fut souvent de cette marginalité où la sexualité n'était pas figée. Est-ce l'influence d'Irving Layton, dont les prises de positions étaient souvent rétrogrades derrière un humour affiché, qui plaça Cohen dans ce type de contradictions ? La détestation d'Allen Ginsberg en ce qu'il représentait une démolition totale de l'ordre bourgeois quand Cohen et Layton préféraient s'attacher à une tradition juive qui semblait relever de l'orthodoxie pouvait laisser penser que la revendication homosexuelle d'Allen Ginsberg était de nature à susciter un rejet de la chose.
Passons, d'autant que la poésie de Cohen a à de nombreuses reprises posé la question de la nature de la sexualité masculine, toujours trouble. Il a lui-même revendiqué son admiration pour la poésie de Federico García Lorca dont l'homosexualité n'a jamais été un mystère et qui fut même sans doute à l'origine de son assassinat. Il n'ignorait pas non plus celle de Cavafis à qui il rend hommage par cette chanson.  La poésie sublime largement l'appartenance à quelque genre que ce soit ; le Moyen-âge occitan voyait l'amour quand on n'avait cure de savoir à quel sexe il appartenait...


lundi 6 novembre 2017

La dérade

Un très beau court, avec un improbable scénario qui reste à l'état d'hypothèse au tarabiscot. Mais cela valait la peine d'être essayé : ce n'est pas raté.



dimanche 5 novembre 2017

La mémoire et la mer

Le grand Léo d'il y a longtemps, quand tout était déjà comme maintenant...

Le bon soleil revient : passez un agréable dimanche !



samedi 4 novembre 2017

vendredi 3 novembre 2017

Avant Stonewall

Vivre dans le placard, avant l'événement que fut Stonewall. Sauf que le placard existe encore et que rien n'est vraiment gagné...



jeudi 2 novembre 2017

Fernand Pouillon

Opposer Fernand Pouillon à Le Corbusier n'a pas beaucoup de sens. Peut-être vaguement une vertu heuristique : deux conceptions différentes du monde s'opposent dans leur présence dans le vingtième siècle. Les divagations sur le modulor, censé adapter les fonctions d'un habitat à la dimension humaine, ne relève finalement que d'une pseudo-naturalisation des besoins des hommes dans la société. Il ne faut donc pas s'étonner que cette approche de Le Corbusier, ce pseudo-naturalisme, l'ait également amené à concevoir un monde où l'on ferait table rase de ce qui ne paraît pas authentique, productions humaines comme présences humaines. Paradoxalement, Le Suisse Charles-Edouard Jeanneret-Gris - Le Corbusier pour l'architecture - trouve en France, terreau fertile du totalitarisme instillé depuis les rois de France, l'expression idéale de son art. On trouvera dans l'ouvrage de l'excellent François Chaslin, Un Corbusier, paru en 2015, un regard et une analyse sur son oeuvre.

Mais je reviens à Fernand Pouillon, décédé en 1986 à soixante-quatorze ans. Sa vie fut une aventure extraordinaire, dont une partie est racontée ici dans cette vidéo, interviouvé par Pierre Dumayet, après la parution de son autobiographie, Mémoires d'un architecte, en 1968. On trouvera sur la Toile les informations utiles qui le concernent. Néanmoins, sa conception du monde fut celle d'un humaniste, d'un chercheur essayant d'appliquer ses réflexions à l'amélioration des conditions de vie du plus grand nombre.

Reprenant la blague du modulor de Le Corbusier qui serait une redécouverte du nombre d'or, c'est-à-dire la mesure du rapport entre les dimensions qui constituent une oeuvre physique, naturelle, qu'on peut alors appliquer à toute oeuvre artistique, donnant le sentiment d'une harmonie, c'est-à-dire d'une sensation agréable à contempler ou à entendre, Fernand Pouillon a raconté dans un livre remarquable, un roman, Les pierres sauvages, comment les hommes du Moyen-âge se sont appropriés ces notions pour établir un monument tout aussi remarquable, l'abbaye du Thoronet, en Provence. Je présenterai dans quelques jours le livre. Le Moyen-âge hérita de l'Antiquité cette connaissance de l'art de bâtir. Il est donc assez amusant de laisser croire que Le Corbusier aurait théorisé cette approche architecturale, qui était en application dans de nombreux bâtiments, et que les peintres de la Renaissance ont utilisée également dans la composition des scènes de leur peinture. Nombre d'or qui relève principalement de la technique et non applicable à la manière dont les sociétés évoluent et choisissent leur manière d'être...


mercredi 1 novembre 2017

Constantinos Cavafis - Makria

Από την ταινία: Καβάφης του Γιάννη Σμαραγδή/Un extrait du film: Cavafy de Yannis Smaragdis
Μακριά - Κωνσταντίνος Καβάφης/ Au loin - Constantin Cavafis Θα 'θελα αυτήν την μνήμη να την πω/Je veux que ce souvenir dise -
Μουσική: Βαγγέλης Παπαθανασίου/ Musique: Vangelis Papathanassiou