Ainsi il y aurait une sorte d’injonction qui ferait
que l’on doit apprécier tous les films dont le prétexte est une histoire
d’amour gaie. Je m’apprêtais à faire la recension du film Call me by your name qui m’a passablement agacé lorsque lisant les
commentaires d’un autre blog, je vois que l’on fait référence à mes billets
concernant les deux films Call me by your
name et God’s own earth.
J’avoue que j’en reste un peu décoiffé : outre
qu’il est assez cocasse que des commentateurs expriment leur sentiment sur mes
billets sur un autre blog, je dois avouer que le blog en question ne manque pas d’une certaine
aisance dans ses manières de faire.
Que l’on fasse le choix de la médiocrité
intellectuelle assumée et de l’imposture esthétique est également une façon
d’être. Chacun est libre de se donner en spectacle dans ce qui à mon sens est
devenu le pathétique de ces blogs qui n’ont plus de commentateurs que
cacochymes. Mais lisant ces mêmes commentaires, je vois qu’il m’est dénié le
droit de critique de ce cinéma, certes non indigent, mais très insuffisant. Les
deux réalisateurs, Francis Lee pour God’s
own earth * et Luca Guadagnino pour Call me by your name me semblent insuffisamment matures dans leur
réflexion et leur culture cinématographique. Ce n’est pas grave, mais s’exposant
à publier un travail cinématographique ils encourent la critique. Je ne me
restreindrai pas, au prétexte que s’agissant de cinéma gay, il conviendrait
d’aller dans leur sens et accepter que ce type de cinéma soit un moyen de
faire accepter le fait homosexuel dans la société, qu’elle soit rurale ou non.
Ce n’est pas le rôle du cinéma. Le cinéma gay a de magnifiques lettres de
noblesse, et je n’y reviendrai pas aujourd’hui. Je citerai à nouveau toutefois Happy together (1997) de Wong Kar-Wai,
qui reste à mon sens une référence cinématographique incontournable.
Comment ne pas considérer comme insultant le
commentaire de mon billet qui, de manière pour le moins désinvolte, se permet
de faire accoler les deux expressions « petits-bourgeois »,
et « il va y avoir du monde à la potence ». Je considère que
l’auteur de ces propos les a écrits en toute connaissance de cause, et je lui
en donne acte.
Comme disait l’autre, « quand les bornes sont
dépassées »…
J’ai beaucoup restreint mes publications.
Paradoxalement, les connexions à mon blog n’ont jamais été aussi nombreuses.
J’avais pris la décision d’arrêter ce blog lorsque j’aurai fini les derniers
textes qu’il me reste à finaliser. Rien
aujourd’hui ne me donne l’envie de revenir sur cette décision.
* Un lapsus m'a fait écrire God's own earth. Il faut bien sûr rétablir le titre exact : God's own country.
Voici les commentaires :
Quel beau débat
avez-vous lancé, Silvano, nourri, enthousiaste, vif, diversifié, à propos de
Call me by Your Name.
J'ai adoré le film. Je comprends aussi qu'il puisse susciter des réticences,
ainsi celle exprimée déjà le 28 décembre 2017 par Celeos, auteur d'un blog
engagé, Véhèmes : "... je subodore, justement, — mais ceux qui me lisent
savent que j’ai parfois la dent dure et quelquefois mauvais esprit — que la
mise en spectacle de ce roman cache peut-être ce que je reproche bien souvent à
ce qu’on appelle la « culture gaie », à savoir sa mise en scène de manière «
hors sol » : un milieu petit-bourgeois, intellectuel, sans problème économique
particulier dans lequel émerge un amour qui relève davantage du romanesque que
du romantisme ...".
Une célèbre Tête de méduse orne ce blog, loin de l'Italie souriante, qui
grimace d'ailleurs depuis les élections du 4 mars. Le chemin toscan que vous
développez aujourd'hui m'évoque les incertitudes dont souffre ce merveilleux
pays, ainsi que d'autres en Europe. On ignore où mène cette montée en zigzags
parcourue par deux humains, petits, fragiles.
Alors les joutes esthétiques ? Poursuivons-les malgré leur vanité. Jamais nous
ne convaincrons, hormis ceux qui sont de notre chapelle ou veulent y accéder.
Récemment, je me suis souvenu d'une question posée par une femme aussi savante
que spirituelle : "En matière de goût, s'il existait des critères
objectifs pour décider, qu'en feriez-vous ?"
On continuera toujours de disputer, source d'enrichissement de l'esprit.
Pourquoi ? La réponse se trouve peut-être dans la "Critique de la faculté
de juger" (1790) - c'est ce que je connais de plus solide, mais lire Kant
est tellement rebutant ...
Merci MamyGrand,
j'aime les commentaires qui prennent une certaine hauteur. Oui, j'avais lu les
réticences de Celeos en décembre, qui n'avait pas encore vu le film, et pour
cause. Je n'ai pas les moyens de louer une maison de style en Lombardie, mais
ça ne me dérange pas que des intellectuels présentés comme
"petits-bourgeois" y passent leurs vacances, en jouant du Bach et en
lisant des livres : il va y avoir du monde à conduire à la potence !
Notre ami flinguait un peu plus tard le bon film "Seule la terre" qui
se déroule en milieu âpre, terrien, en concluant son (bon) billet par ces mots
: "Bon, encore un film gay raté. Ce n’est pas très grave."
Mais le blog s'intitule Véhèmes et s'engage : ce que l'on ne saurait contester.
GayFred37 a
dit...
Comment peut-on ne pas
avoir aimé " SEULE LA TERRE (God's Own Country) "
de Francis LEE ??? J’ai pourtant été remué 27 ou 28 fois par
" LE SECRET DE BROKEBACK MOUNTAIN (Brokeback Mountain)
" de Ang LEE,... qui m’a paru une bluette, à la sortie de
cette unique projection !
Je suis véhément contre CELEOS !
MAIS TOUS LES GOÛTS SONT DANS LA NATURE !
FRÉDÉRIC.
Tous les goûts...,
Fred.
Raison de plus pour ne pas être véhément, allons.
J'ajoute que oui, la
situation politique, en Italie, est plus que préoccupante.
GayFred37 a
dit...
Par honnêteté intellectuelle, je viens de lire le billet de CELEOS sur "
SEULE LA TERRE ". Son avis est tranché, certes, mais il est dommage qu’il
ait pu empêcher certains de ses lecteurs d’aller voir ce film ! Étonnant de la
part d’une personne vivant dans le monde rural, si j’ai bien compris. Le titre
français du film est ce qu’il est, mais plus philosophique et plus parlant /
parlable que l’appellation anglaise. La sonorité anglaise du titre peut faire
référence au caractère âpre et dur de la campagne anglaise (Galloise,
irlandaise, écossaise ? [West Yorkshire, selon IMDb]). Quant à l’histoire
elle-même, elle est condensée en 104 minutes, donc le réalisateur est bien
obligé d’aller à l’essentiel, éludant certains détails, ou évitant de
s’appesantir. OUI, il est dommage de sabrer certaines oeuvres par de pareils
avis, quand on connaît la difficulté de vivre son homosexualité ou bisexualité,
notamment à la campagne.