J'avais revu, il y a
quelques mois le film des frères Taviani, Padre padrone, film
important, sorti en 1977 — année marquante à bien des égards — , en
m’interrogeant sur la manière avec laquelle les jeunes générations pourraient
aujourd’hui regarder ce film, et sans doute avec beaucoup de distance. J’y
reviendrai. Le cinéma a accompagné pendant tout le XXe siècle les questionnements que le monde en
plein bouleversement a suscités, et aucun lieu de ce monde n’y a échappé.
Peut-être a-t-il fallu le regard singulièrement incisif des Italiens pour
donner à ce point ce sentiment d’une tradition de l’image qui puise ses sources
aux temps précieux de la Renaissance, où le raffinement a côtoyé sans vergogne
les barbaries, sans s’imaginer qu’on était sans doute loin des industries qui
viendraient quelques siècles plus tard. Je ne crois pas qu’on puisse en finir
de revenir sur la richesse de ce cinéma, et de la maîtrise avec laquelle les
cinéastes se sont emparés de cette matière.
D’entre eux, Vittorio et Paolo Taviani ont su particulièrement donner ce ton d’une superbe
narration de l’histoire italienne. Voici un extrait de La notte di san Lorenzo, qui raconte cette nuit du mois d’août 1944,
moment des Perséides où les étoiles viennent à la rencontre de ceux qui sont en
recherche d’espoirs divers. Il ne faut jamais rater ces moments-là qui
redonnent la dimension des hommes face à l’immensité de l’univers. C’est là que
l’on retrouve son humanité, ce que Vittorio et Paolo Taviani avaient en
partage. L’extrait donne la manière dont les combats sont vécus dans le mélange
des époques et dans cette conscience que ce que chacun peut vivre appartient
encore à une mythologie, fût-elle portée par les événements tragiques auxquels
le présent ne manque pas de pourvoir.
Vittorio est décédé ce
quinze avril dernier, le surlendemain de Milos Forman. S’il existe une grande
nostalgie à revoir ce cinéma, je reste persuadé que la manière singulière qu’ils
ont eue de filmer appartient de plein droit aux meilleurs moments du cinéma
italien dont les réalisateurs actuels seraient d’une grande vertu de s’inspirer.
Je parlerai dans quelques jours de Padre padrone.
Bizarre autant qu'étrange , je vous l e concède , mais je ne me souviens pas d'un film des frères Taviani, (ni des frères Dardenne, je dois dire) comme si les fratries ne réussissaient pas à m'émouvoir assez, alors que Vittorio De Sica , Antonioni, Fellini, Pasolini, Visconti , Ferreri, oui!
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