José Jiménez Fernández, dit Joselito
Les enfants prodiges ont généralement des destins étranges : adulés pendant leur enfance, le talent qui les a portés pendant quelques années et qu'on leur a unanimement accordé leur devient objet de souffrance. Perdus dans une époque qui ne les reconnaît plus pour ce qu'ils étaient, ils s'évanouissent comme des étoiles mortes.
En fait, ces enfants disent davantage de la société pour laquelle ils ont joué un rôle éminent que d'eux-mêmes qui, en fin de compte, n'existent pas en dehors de leur aptitude artistique. C'est sans doute le destin de Joselito, "l'enfant à la voix d'or", le "rossignol andalou" - pardon je m'égare, ça, c'est Federico García Lorca - qui fut l'enfant utile pour permettre à l'Espagne de retrouver une image acceptable après l'effroyable guerre civile, et permettre de sublimer la pauvreté d'après la Seconde guerre mondiale où les enfants vivaient nus dans des villages exsangues (je n'exagère pas, même si c'est une vision forcément réductrice. Je prévois bientôt un documentaire de Buñuel qui ne sera pas sans commentaires, mais l'Espagne fut aussi cela).
Oublions ainsi le Général Franco, tyran narcissique - n'est-ce pas un pléonasme ? - dont l'image abreuvait toute correspondance avec l'Espagne sur les timbres-poste. Avec l'image d'un enfant à la voix pure, orphelin dans le premier film tourné par Joselito - Le petit vagabond/El pequeño Ruiseñor - les deux éléments d'une reconquista idéologique (la religion salvatrice et la miséricorde de Dieu d'un côté, le folklore et le talent miraculeux de l'autre) sont proposés comme moyens de s'identifier à une nouvelle Espagne amnésique des années précédentes.
Si l'enfant d'alors a encore une voix de crécelle dans le premier film, il a déjà acquis pour autant une incroyable maîtrise technique, et en quelques années il fait preuve d'une maturité vocale professionnelle. Mal lui prend de grandir : il fait quelques films arrivé à l'âge adulte, mais son image ne correspond plus aux attentes de ce nouveau temps. La Movida espagnole efface bientôt toute trace, ou à peu près, de la période où l'enfant à la voix d'or fréquentait Elvis Preslay, Giovanni XXIII, Che Guevara et Fidel Castro !
Je me suis laissé dire que Joselito chantait encore... Je n'aurai pas la cruauté de proposer de vidéo de lui aujourd'hui chantant.
En fait, ces enfants disent davantage de la société pour laquelle ils ont joué un rôle éminent que d'eux-mêmes qui, en fin de compte, n'existent pas en dehors de leur aptitude artistique. C'est sans doute le destin de Joselito, "l'enfant à la voix d'or", le "rossignol andalou" - pardon je m'égare, ça, c'est Federico García Lorca - qui fut l'enfant utile pour permettre à l'Espagne de retrouver une image acceptable après l'effroyable guerre civile, et permettre de sublimer la pauvreté d'après la Seconde guerre mondiale où les enfants vivaient nus dans des villages exsangues (je n'exagère pas, même si c'est une vision forcément réductrice. Je prévois bientôt un documentaire de Buñuel qui ne sera pas sans commentaires, mais l'Espagne fut aussi cela).
Oublions ainsi le Général Franco, tyran narcissique - n'est-ce pas un pléonasme ? - dont l'image abreuvait toute correspondance avec l'Espagne sur les timbres-poste. Avec l'image d'un enfant à la voix pure, orphelin dans le premier film tourné par Joselito - Le petit vagabond/El pequeño Ruiseñor - les deux éléments d'une reconquista idéologique (la religion salvatrice et la miséricorde de Dieu d'un côté, le folklore et le talent miraculeux de l'autre) sont proposés comme moyens de s'identifier à une nouvelle Espagne amnésique des années précédentes.
Si l'enfant d'alors a encore une voix de crécelle dans le premier film, il a déjà acquis pour autant une incroyable maîtrise technique, et en quelques années il fait preuve d'une maturité vocale professionnelle. Mal lui prend de grandir : il fait quelques films arrivé à l'âge adulte, mais son image ne correspond plus aux attentes de ce nouveau temps. La Movida espagnole efface bientôt toute trace, ou à peu près, de la période où l'enfant à la voix d'or fréquentait Elvis Preslay, Giovanni XXIII, Che Guevara et Fidel Castro !
Je me suis laissé dire que Joselito chantait encore... Je n'aurai pas la cruauté de proposer de vidéo de lui aujourd'hui chantant.
Le passage du "pequeño Ruiseñor" au "petit vagabond" est curieux d'un point de vue strictement linguistique, surtout que le titre espagnol pouvait renvoyer en France à la "Cage aux rossignols" sorti dix ans plus tôt. Le plus piquant, c'est que le titre français retrouve le titre d'un film chinois antérieur de quelques années... qui n'aurait probablement pas eu droit de cité dans l'Espagne de Franco.
RépondreSupprimerSi vous saviez ce que vous remuez-là ! Je suis tombé du haut de ma nostalgie, quand j'ai revu, récemment, l'un de ses films sur une chaîne de la TNT : la voix est insupportable, du genre à vous faire planquer tous les contenants en verre environnants, le gamin cabotine à outrance, les films dégoulinants...
RépondreSupprimerEt moi, qui, enfant, l’idolâtrais !
Ce titre fait appel à la vision misérabiliste de l'Espagne de cette période, propre à conforter l'esprit des Français alors. Le thème de l'enfant orphelin et vagabond hante d'ailleurs la littérature. Ce "vagabond" a été préféré au "rossignol", peut-être pour éviter une confusion ou une concurrence avec La cage aux rossignols comme vous le suggérez.
RépondreSupprimerEh oui, l'enfant cabotine, il appartient à cette période désolante où le Caudillo continuait ses traques, et le pauvre Joselito est l'exemple même d'un produit de consommation. Pour autant, je ne suis pas insensible à sa voix qui fut très belle parfois.
RépondreSupprimerJoselito fut c'est Vrai une idole de mon enfance et si il y a un souvenir que je garde de lui, c'est l'interprétation d'un Ave Maria mais les techniques d'enregistrement de l'époque ne permettent plus de transmettre l'émotion passée sur " matériel de diffusion de l'époque" (et cela est vrai pour de très grands virtuoses - écouter ce que Deutsche Gramophone a gravé dans une série intitulée "privilège" ressort parfois du perçage de tympan)
RépondreSupprimerVous animez,là,de très doux et tendres souvenirs d'enfance, auprès d'une des plus belles amies de ma vie ; celle avec qui, j'ai appris l'Amitié.
RépondreSupprimerElle m'accompagne toujours en toutes circonstances et plus le monde devient sombre, plus elle l'éclaire.
(Il faut dire qu'enfants, nous étions très têtues.)
Depuis plusieurs années, elle est devenue invisible à mon regard.
Marie
Je ne peux que me réjouir que vous ayez été une enfant têtue, Marie, rien n'est pire qu'un enfant soumis ! Et j'imagine que vous savez entretenir de belles amitiés, au-delà de toute limite, même les plus fortes.
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